Qu'il s'agisse de ses films, de sa famille ou de ses actions humanitaires, Angelina Jolie n'a jamais fait les choses à moitié. Alors qu'elle se prépare à terrifier les enfants du monde entier dans le rôle de la délicieuse et diabolique Maléfique, l'actrice et réalisatrice a invité le directeur artistique de la maison de haute couture Saint Laurent, Hedi Slimane, pour une séance photo très naturelle, complètement à nu - toujours incroyablement belle à 39 ans. Elle a confié à Maggie Bullock qu'elle ne fait que des choses qui ont réellement un sens pour elle et a expliqué pourquoi Brad et elle sont plus intéressés l'un par l'autre que jamais.

Il existe une vidéo des coulisses du tournage, certainement enfermé dans un coffre dans les studios Disney, pour laquelle les tabloïds donneraient des millions. Dans celle-ci, Vivienne Marcheline Jolie-Pitt, fait ses débuts sur grand écran dans 'Maléfique', prochain préquel de 'La Belle au Bois Dormant'.

"Le premier jour, elle ne voulait pas enfiler la robe. Puis elle avait faim et voulait retirer la robe. Ensuite elle ne voulait pas se laisser coiffer. Puis elle voulait jouer dans la boue. Ensuite elle a perdu sa chaussure", raconte la mère de la jeune actrice. "Tout ce qu"elle avait à faire ce jour-là était de courir après une petite balle accroché à l'extrémité d'un bâton, qui serait ensuite transformé en papillon. Au bout d'un certain moment, nous avons compris que tout ce qu'on lui demandait de faire, elle ne le ferait pas". Donc Angelina Jolie et Brad Pitt ont passé la journée à se comporter comme des clowns de rodéo. "Je tenais le bâton et Brad se trouvait au bord de la (fausse) falaise, de façon à ce que lorsque Vivienne saute, elle atterrisse directement dans ses bras. Et nous sommes là à faire ces grimaces, chanter des chansons, tout ce qu'on peut faire", dit-elle, secouant la tête avec cette affection familière à tous les parents. "Les studios Disney m'ont dit qu'il s'agissait des scènes coupées les plus drôles qu'ils aient jamais eues".

Angelina Jolie nous raconte cette histoire dans la cafétéria située dans les Studios Universal à Los Angeles, un endroit qui est notable pour la simple et bonne raison qu'il fait partie des rares endroits dans le monde où Angelina Jolie peut déjeuner tranquillement au vu et au su de tous. Alors qu'elle remue du miel dans son thé à la menthe - on lui a ramené sans même demander - et parle ouvertement de sa tribu de six enfants, manifestement son sujet favori, je prends un instant pour observer son visage qui est, d'une certaine manière, différent de tous les autres. Angelina Jolie a vraiment été gâtée par la nature : les pommettes, les lèvres charnues, les yeux en amande d'un vert à peine perceptible. Ce qui est assez surprenant dans le fait d'avoir ce visage si bien connu à quelques centimètres de vous, c'est ce corps qui a l'air si fragile. Elle est presque fantomatique dans sa minceur. Cette silhouette qui frappait, griffait et tirait dans 'Salt', 'Mr and Mrs Smith' et 'Tomb Raider' irradie toujours à travers l'esprit, mais plus à travers les membres. En effet, habillée de ses habituels pantalon noir et chemise noir - les tatouages visibles sur ses bras, rappelant vaguement la rebelle qu'elle était autrefois - il y a quelque chose de presque incorporel chez cette femme.

Cela a probablement quelque chose à voir avec le projet qu'elle a laissé à contrecoeur à l'étage pour quelques heures - le montage de son deuxième film en tant que réalisatrice 'Unbroken' sur fond de Seconde Guerre Mondiale, qui sortira sur les écrans en fin d'année aux États-Unis. Angelina Jolie étudie depuis toute la matinée des modèles du bombardier lourd américain B-24 et du chasseur bombardier utilisé par la marine impériale japonaise, le Japanese Zero. C'est le genre de travail qui fait appel à son côté casse-cou (n'oublions pas que Brad Pitt et elle ont tous les deux leur licence de pilote et qu'ils ont tous les deux leur propre avion). Il s'agit là d'un détail parmi des millions d'autres afin de raconter précisément l'histoire vraie de Louis Zamperini, un délinquant des années 30 devenu coureur olympique, puis aviateur dans l'armée américaine, survivant d'un crash d'avion, abandonné pendant 47 jours sur un radeau en caoutchouc et ayant passé plus de deux ans de tourment dans les camps de prisonniers de guerre de l'armée japonaise - avant de revenir aux États-Unis en héros national. Son histoire est le sujet du livre de Laura Hillenbrand paru en 2010 ; c'est également un projet qui est en suspens depuis que Zamperini a vendu les droits du film il y a 55 ans.

"Je suis heureuse de pouvoir faire quelque chose qui n'a rien à voir avec ma présence physique, mais plutôt avec mon esprit. Cela me rend vraiment heureuse. Je suis beaucoup plus à l'aise de cette façon", déclare-t-elle, se désignant elle-même comme pour dire : "Cette fois, c'est vraiment moi, en mode réalisatrice". Elle est réellement reconnaissante de l'opportunité qu'elle a de jouer dans des films, mais admet librement qu'elle apprécie cette partie de son travail "jusqu'à un certain point seulement".

Il n'y a rien de surprenant pour une femme qui a créé en six ans une famille de six enfants issus de continents différents, qui s'implique pour les réfugiés présents dans des camps à travers le monde entier, qui a construit sa propre définition de la vie de famille avec le sex-symbol le plus célèbre d'Hollywood, de se plonger à coeur perdu dans la nouvelle passion de sa carrière. Ses premiers pas dans le domaine avec son film, 'Au Pays du Sang et du Miel' réalisé en 2011, a créé une controverse politique avant même sa sortie en exposant la brutalité de la guerre civile en ex-Yougoslavie dans les années 90, à travers l'histoire d'amour d'une bosniaque et de son ravisseur, un soldat serbe. Le résultat fut un film raconté avec une profonde humanité et une détermination évidente de représenter fidèlement la vérité de l'époque. Il était également puissant, sans concession et avec beaucoup de cran - faisant directement entrer Angelina Jolie dans le club très fermé des rares femmes réalisatrices.

Mais 'Au Pays du Sang et du Miel' était un film indépendant avec un budget relativement modeste de 10 millions de dollars. Par contre, 'Unbroken' sera une superproduction hollywoodienne, avec tous les avantages, les attentes et les moyens techniques qui vont avec : "Des attaques de requins, deux crashs d'avion, deux plateaux de tournage différents sur mer, des cages dans la jungle, deux immenses camps de prisonniers, une carrière, 200 figurants dans chaque camp", dit Angelina Jolie, le tout se déroulant sur une période couvrant les années 20 jusqu'à la Seconde Guerre Mondiale en y mêlant Hitler et les jeux olympiques de 1936. Engagés pour revoir le script, les cinéastes chevronnés, Joel and Ethan Coen, ont qualifié le projet de "putain de merde", plaisantant sur le fait qu'ils étaient heureux de se se contenter d'écrire le script, plutôt que de devoir réfléchir sur la façon dont réaliser le film. Ajouté à cela le fait que Universal a prévu la sortie du film pour le jour de Noël et a dévoilé une bande-annonce pendant la cérémonie d'ouverture des Jeux Olympiques de Sochi, et vous aurez une idée de l'enjeu. 'Unbroken' sera un test dans la carrière de Angelina Jolie. Une actrice très célèbre qui devient une réalisatrice reconnue est assez inhabituel - qui, à part Jodie Foster, vous vient à l'esprit ? Une célèbre actrice qui devient une réalisatrice d'un film de guerre à gros budget ? Cela ne s'est jamais vu.

Angelina Jolie n'a plus joué dans un film depuis 2010, dans 'The Tourist' aux côtés de Johnny Depp et dans 'Salt'. Pour la faire revenir devant l'écran, "il me fallait un rôle un peu extrême, qui m'entraine hors de ma zone de confort", dit-elle. "Et qui soit assez étrange pour ne pas me donner l'impression de revenir en terrain connu". C'est certainement ce que lui a offert Maléfique. Quand je lui dit qu'elle est extrêmement terrifiante dans le film, elle semble touchée, comme si je venais de lui faire le plus beau des compliments. "Oh, merci", me répond-elle avec une sincère reconnaissance.

Un petit rappel : dans le film d'animation 'La Belle au Bois Dormant' de 1959, l'imposante et cornue Maléfique jette un mauvais sort à l'angélique Princesse Aurore. Cette dernière se piquera mortellement le doigt au fuseau d'un rouet - un destin évité grâce à une bonne fée qui parvient à atténuer le sort : Aurore dormira dans un sommeil profond jusqu'à ce qu'elle reçoive un baiser d'amour sincère. La plupart des petites filles adorent (et s'identifient) à la Princesse Aurore ; trouvez-vous surprenant que la jeune Angelina préférait Maléfique ? "Je ne sais pas pourquoi", dit-elle, après réflexion. "Je crois que j'adorais la détester. Elle me terrifiait et m'attirait à la fois incroyablement". Elle n'était pas la seule ; avant de dépenser environ 200 millions de dollars pour le film, les studios Disney ont réalisé une étude de marché et se sont aperçus que Maléfique était préférée devant Ursula, Cruella d'Enfer et le Capitaine Crochet. (Bien sûr, il y a une ombre au tableau. "En fait, nous en avons beaucoup discuté", dit Jolie. "Comment peut-on faire un film pour enfants dans lequel quelqu'un jette un mauvais sort à un bébé ?").

Elle est donc devenue la star du film, et non sa réalisatrice - un poste occupé par Robert Stromberg, plusieurs fois oscarisé pour son travail sur les effets spéciaux ('Avatar', 'Alice au Pays des Merveilles'). Il réalise là son premier film - malgré tout, Angelina Jolie avait déjà des idées bien définies. Elle voulait être sûre que les studios Disney n'en fassent pas quelque chose de trop mou ; que l'on puisse comprendre pourquoi Maléfique est si diabolique. "Elle était vraiment concentrée sur ce qu'elle avait en tête pour le film", raconte le producteur Joe Roth, spécialiste dans l'art de revisiter un conte de fée (il a produit en 2010, avec Tim Burton, 'Alice au Pays des Merveilles'. "C'est de ce genre de détermination dont il faut faire preuve en tant que producteur : est-ce que cela fera un super film ou est-ce que nous allons droit dans le mur ? Elle est focalisée sur le fait de faire un bon film. C'est une perfectionniste. Elle n'est pas intéressée par les personnes qui ne donnent pas leur maximum pour obtenir de grandes choses, elle a besoin de personnes qui ont le même niveau d'exigence qu'elle. C'est un travail compliqué, mais à la fin, nous obtenons un super résultat". Angelina Jolie, dit-il, est "impliqué dans tous les aspects du film, et notamment dans le choix des costumes. Elle a une idée très claire de qui elle est en tant que personne, mais également de la façon dont les gens la perçoivent. Durant toutes ces années, je n'ai jamais travaillé avec quelqu'un qui a une vision aussi précise de ce que doit être un acteur".

Le film original, conçu en images de synthèse, se concentrait sur les intonations graves et effrayantes dans la voix de Maléfique, ce grognement vous donnant la chair de poule qui a hanté les nuits des enfants pendant des générations. Apprendre à rugir - même pour Jolie, par son attirance pour les armes à feu et les combats au corps à corps - nécessite de l'entrainement. "Très peu de femmes utilisent la pleine puissance de leur voix, avec toute son amplitude et sa force", dit-elle. "Je me suis rendue compte moi-même que je n'avais jamais l'opportunité d'utiliser ma voix pleinement, ni à la maison ni ailleurs". Trouver sa voix fut "comme recevoir un coup de poing dans l'estomac", dit-elle. "La première fois que ma voix pleine est sortie, je n'ai pas cru que ce son provenait de moi. Je recommande à tout le monde, d'aller près de l'océan ou n'importe où et d'essayer".

Puis se sont ajoutées les lentilles de contact d'un ambré inquiétant, les longues robes "et le bâton", raconte sa partenaire, Elle Fanning. Elle incarne Aurore, qui va apporter de la douceur au côté obscur de Maléfique. "Cela fait vraiment partie de son personnage, donc elle se baladait avec sur le plateau de tournage. Elle arrivait avec son bâton et surplombait la pièce. Et on était genre "C'est trop Maléfique"".

Les prothèses l'ont rendu encore plus impressionnante : ciselés, comme si les pommettes avaient été allongées, et assez près du nez pour durcir ses traits inoffensifs - et tout ceci d'après les instructions précises d'Angelina Jolie. (Roth raconte que la seule fois où il est intervenu, c'est lorsque les pommettes étaient vraiment trop prononcées : "Quel est l'intérêt d'avoir Angelina Jolie si c'est pour qu'elle ressemble à Elephant Man ?"). La transformation est surréaliste - Angelina Jolie est réellement devenue Maléfique, une transformation plus vraie que nature qui a même surpris l'actrice. "Avec ces cornes et ces talons, je suis devenue une créature de plus de deux mètres, toute étonnée que les enfants refusent de me parler".

La simple vue d'Angelina Jolie dans son costume provoquait des crises de pleurs chez les enfants castés pour jouer le rôle de Aurore enfant. "Cette pauvre petite fille - cette silhouette va la hanter toute sa vie", dit Jolie. "Elle sera effrayée par les chèvres et ne saura même pas pourquoi". Même le fils de 10 ans de l'actrice, Pax, ne voulait pas l'approcher avant d'avoir visiter avec ses frères et soeurs la caravane dédiée au maquillage où ils ont pu voir comment ses fausses dents, ses yeux et ses prothèses étaient posés.

Par conséquent, Vivienne (la soeur jumelle de Knox) est apparue comme une nécessité. Pour incarner Aurore enfant, ils avaient besoin d'un enfant qui ne soit pas intimidé par Maléfique lorsqu'elle dit qu'elle n'aime pas les enfants.

"Et ma petite Vivienne - elle est comme mon ombre. Je peux être fatiguée, grincheuse ou de très mauvaise humeur, elle s'en fiche. C'est "maman, maman" et elle reste cramponnée à moi", dit Jolie. "On savait qu'elle continuerait à me sourire et à me tendre les bras quoiqu'il arrive".

Pax et Zahara, âgée de neuf ans (ou ZZ, comme la surnomme Angelina Jolie) apparaissent également dans le film, une brève apparition dans la scène du baptême. (Par contre, aucune trace de Shiloh. "J'ai parlé à Shiloh du rôle d'Aurore et elle m'a rit au nez", dit Jolie avec une fierté évidente. "Elle m'a dit qu'elle serait une créature à cornes"). Mais ne vous attendez pas à ce que cela se produise. "Brad et moi avons pris la décision de ne pas les tenir éloignés des plateaux de tournage et du plaisir de faire des films, mais nous ne voulons pas qu'ils idéalisent le cinéma. On ne veut pas en faire une bonne ou une mauvaise chose. Mais je préfèrerais vraiment qu'ils fassent autre chose", dit-elle. Quoiqu'il en soit, "après deux jours, Brad et moi étions si stressés que nous ne voulions plus jamais recommencer".

Si Jolie éprouve une certaine fierté pour le côté garçon manqué et casse-cou de sa fille de sept ans, Shiloh - "Nous plaisantons sur le fait qu'elle ait hérité de notre côté tête brulée. Nous en parlons souvent" - c'est probablement parce que, comme sa fille, en grandissant, elle était plus intéressée par les couteaux que par les robes. Elle côtoyait les gosses de riches au lycée de Beverly Hills, mais était issue d'un foyer au budget serré - sa mère, l'ancienne actrice Marcheline Bertrand, a arrêté sa carrière pour élever ses deux enfants, et ce sans le soutien de leur célèbre père, Jon Voight, qui les a abandonné - Angelina Jolie n'était pas vraiment du genre reine du bal. "Au lycée, tous mes amis étaient toujours des garçons. Je ressemblais beaucoup à Shi", dit-elle. "Je n'étais pas très sociable. Je ne faisais pas les boutiques. Je n'ai jamais assisté à une soirée pyjama. J'étais très secrète". Elle avait néanmoins quelques amis et à l'âge de 14 ans, son petit-ami a emménagé chez elle.

Jolie adorait sa mère, qui est décédée en 2007, à l'âge de 56 ans, d'un cancer des ovaires ; elle parle d'elle avec admiration, la qualifiant de "femme très douce", le genre à ne jamais élever la voix sur ses enfants. Mais le fait de voir sa mère luttant pour s'occuper seule de sa famille n'a pas été sans conséquence. "Je n'aurais jamais pensé avoir des enfants. Je n'aurais jamais pensé que je tomberais amoureuse, ni que je rencontrerais la bonne personne", dit Jolie. "Lorsque vous venez d'un foyer brisé, vous finissez par vous dire que certaines choses sont du domaine du conte de fées et vous ne les cherchez pas".

Âgée d'une vingtaine d'années, lorsque les journalistes l'interviewaient, elle répondait : "je n'ai absolument rien à partager, je n'ai aucune contribution à apporter, je ne sais pas faire cela. Vous me posez ces questions - vous voulez entendre que vous êtes une personne avec des ressources". Son chemin vers la découverte de soi s'est fait sous les yeux du public : il y a eu la relation bisexuelle, le mariage précoce avec Billy Bob Thornton, les fioles remplies de sang, les démonstrations d'amour et de sexualité en public (pendant les interviews et occasionnellement sur les tapis rouge). Après tout cela, l'information selon laquelle Angelina Jolie s'était soudainement envolée avec les Nations Unies pour une mission humanitaire autour du monde était pour le moins déconcertante.

Tout ce tumulte a été "mal interprété", dit Jolie. "En réalité, il ne s'agissait pas d'un besoin de destruction ou de rébellion - mais plutôt le besoin de trouver ma voie, de repousser ces murs qui m'étouffaient. Vous voulez être libre. A partir du moment où vous vous sentez coicé dans une certaine vie, vous cherchez à aller dans le sens inverse. Cela peut se manifester d'une mauvaise façon, cela peut être mal interprété, mais c'est simplement votre façon de découvrir qui vous êtes vraiment".

Sa plus profonde et constante crainte était "de vivre à moitié", dit-elle. "J'ai réalisé cela très jeune - une vie où l'on n'exploite pas son potentiel, où l'on ne tente pas d'expérience, où l'on a peur, où l'on hésite, me rendrait très malheureuse. Ma seule façon de savoir si je suis sur le bon chemin est d'être sincère avec moi-même, quoi que je fasse. Il se trouve que cela me mène souvent loin de ce qui peut être sécurisant ou classique".

Ne voulant pas se servir de ses problèmes de santé pour promouvoir 'Maléfique', Angelina Jolie refuse d'entrer dans les détails sur le sujet tant analysé de sa double mastectomie, une douloureuse procédure en plusieurs étapes qu'elle a subi l'an dernier après avoir découvert que, comme sa mère, elle était porteuse du gêne défectueux BRCA1. Il est vraiment difficile de l'imaginer plus sincère par rapport à ce qu'elle a traversé que dans sa tribune "Mon choix médical" publié en mai 2013 dans le New York Times. Cet article a permis d'éveiller les consciences et a ouvert le débat sur le dépistage du cancer et ses traitements. Ce serait un acte courageux pour n'importe quelle femme et d'autant plus pour elle qui s'est en partie fait connaitre du public grâce à son sex-appeal.

Au milieu de tout cela, 'Unbroken' a servi de diversion face à cette épreuve. "J'étais très heureuse d'avoir un projet sur lequel me concentrer et me permettant de me remettre immédiatement au travail".

Angelina Jolie a déclaré qu'en 2009, "après avoir passé des mois en robe de chambre" suite à la naissance de ses jumeaux, elle a signé pour 'Salt' - un rôle initialement prévu pour Tom Cruise - parce qu'elle avait hâte d'incarner le rôle le plus difficile, physiquement, de sa carrière. Après s'être tournée vers la maternité, elle souhaitait se battre, donner des coups de poing et des coups de pied à des mauvais garçons. Pour se rappeler (et nous rappeler) le revers de la médaille. C'est un peu la même chose avec 'Unbroken'. Le rôle de Louis Zamperini "est celui d'un homme, un vrai", dit-elle avec un plaisir évident. "C'est comme 'Rocky', 'Luke la Main Froide' ou 'Le Pont de la Rivière Kwai'- il s'agit d'hommes qui se relèvent rapidement. C'est super d'avoir un personnage comme ça. C'est bon pour chacun d'entre nous, mais également pour les garçons". Angelina Jolie, comme toujours, a alors ses enfants à l'esprit, et plus spécialement ses trois fils. "Je pense que 'Unbroken' sera le film qui pourra leur enseigner quelque chose sur la vie que je pourrais essayer de leur expliquer, mais qu'ils comprendront bien mieux en suivant le parcours d'un très grand être humain".

Si elle avait le moindre doute, à savoir est-ce qu'il s'agit pour elle de la bonne histoire à raconter, ceux-ci ont été dissipés lorsqu'elle a décidé de retrouver Zamperini, aujourd'hui âgé de 97 ans, et découvert qu'il vivait en fait à trois minutes de sa maison située sur les collines de Los Angeles - assez près pour qu'elle puisse prendre le petit-déjeuner avec lui, ce qui serait apparemment devenu un rendez-vous régulier. Elle compare ce sentiment à un moment qu'elle a vécu au Cambodge. Elle était alors fraichement divorcée et bien loin d'envisager la maternité et de fonder un foyer. "J'étais assise là avec un groupe d'enfants, au cours d'une mission avec les Nations Unies, et j'étais soudainement absolument sûre que mon fils se trouvait dans ce pays", dit-elle, cette sensation d'émerveillement, lorsqu'elle a rencontré Maddox aujourd'hui âgé de 12 ans, encore bien présente. "Je ne sais pas d'où cela est venu, je ne sais pas ce qui m'a emmené là-bas". Elle hausse les épaules. "Il y a certaines choses dans la vie qui vous font ressentir que vous êtes sur la bonne voie, et si vous y êtes ouvert, il y a quelque chose qui peut vous guider", dit-elle. "J'étais sincère avec moi-même et je faisais quelque chose pour les autres - c'était le bon moment, j'étais sur la bonne voie. Les choses peuvent parfois devenir très claires". Zamperini, toujours invincible après toutes ces années, a réveillé quelque chose en elle. "Aucun film ne compte autant pour moi, aucun sujet ne me parle davantage", dit-elle. "J'avais besoin de Louis personnellement dans ma vie. Il m'a beaucoup aidé à m'en sortir récemment, son combat, son feu, sa volonté d'affronter les choses en face et de s'attaquer aux problèmes".

A l'automne dernier, alors que Angelina Jolie tournait 'Unbroken' en Australie, Brad Pitt travaillait lui sur son prochain film sur la Seconde Guerre Mondiale, 'Fury' en Angleterre. C'est la première fois qu'ils ont rompu la promesse qu'ils s'étaient fait - lorsque l'un tourne un film, l'autre reste à plein-temps avec les enfants - et elle déclare qu'ils ne le feront plus. Interrogé sur ce qui a changé dans sa relation avec Brad Pitt depuis huit ans qu'ils sont ensemble, elle marque une pause. "C'est drôle, c'est le genre de question que je ne me pose pas - je vais le découvrir alors que je suis assise là", dit-elle en riant. "Ce que je ressens ? Brad serait très curieux de le savoir".

Elle réfléchit pendant une seconde. "Nous avons simplement... nous sommes une famille", répond-elle. Pour une femme qui pensait qu'elle ne construirait jamais sa propre famille, cela représente énormément. "C'est très différent du couple où vous n'êtes que deux personnes qui s'inspirent l'une l'autre, se défient, se complètent, se rendent joliment dingues. Durant toutes ces années, nous avons construit une histoire - et lorsque vous avez une histoire avec quelqu'un, votre amitié est si profonde, que vous partagez un certain confort, une aisance et un amour sincère qui découlent de tout ce que vous avez vécu ensemble".

Ce qui nous amène à la question suivante - celle qui fait vendre les magazines à scandale depuis huit ans. "Ce qui est amusant, c'est que nous avons oublié que nous étions fiancés. Je ne sais même pas depuis combien de temps nous le sommes".

"Deux ans", dis-je en l'interrompant, peut-être un peu trop brutalement - me demandant comment on peut oublier quelque chose comme ça tout en portant un rappel aveuglant à l'annulaire de la main gauche.

"Merci". Elle rie. "C'est drôle".

Bien sûr, elle ne nous donnera aucun détail. Mais si cela peut vous rassurer, les enfants Jolie-Pitt sont dans le même bateau que nous. "Les enfants sont très excités par cette idée de mariage", dit-elle. "Nous ne pouvons pas leur dire quand il aura lieu. Ils pensaient que ce serait l'an dernier, mais non !". Mais ils ne les feront pas attendre une éternité. Cest une situation assez inhabituelle : c'est comme si nous étions huit à nous marier. Je pense que le mariage, dans ce qu'il a de permanent, tranquilliseraient les enfants. Ils comprennent ce qu'il représente. C'est pourquoi ils aiment l'idée que Papa et Maman soient mariés".

Shiloh ne veut pas être une princesse, mais elle s'entraine déjà pour être demoiselle d'honneur.